Un père écrit pour sa fille
BRUNO Louis de
Blanche d’Hemicour
En français, manuscrit sur papier
Saint-Germain-en-Laye, 1799
Trois volumes : 1er volume de 223 pages, 2ème volume de 243 pages, et le 3ème volume de 242 pages, encre brune sur papier, ratures et corrections. Reliure avec couvertures de papier brun-ocre, dos à six nerfs, annotations. Bon état général (manuscrit), reliures défraîchies. Dimensions de chaque volume : 245 × 195 mm.
Ce roman de 708 pages, a priori autographe, titré Blanche d’Hemicour, est composé de 48 chapitres. Il est précédé d’une dédicace poétique à la fille de l’auteur, Marie Anne Blanche de Milanges.
L’auteur de ce roman est Louis de Bruno (Chandernagor (Inde), 1739-Saint-Germain-en-Laye (France), 1814), Major-Général en Inde et Introducteur des Ambassadeurs de Monsieur, frère du roi. En effet, ce dernier nous informe en page de titre de sa naissance « aux Indes orientales sur les rives du Gange », ainsi que de l’écriture du roman à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) en 1799, lieu de son décès. Louis de Bruno épouse en 1767, à Pondichéry, Marie-Joséphine Law de Lauriston. Ils auront trois enfants : deux garçons, Jean Jacques et Adrien François, futur grand général de l’armée de Louis Bonaparte, roi de Hollande, puis de l’armée française, ainsi qu’une fille nommée Marie Anne Blanche (née vers 1768). La dédicace concorde donc : Marie Anne Blanche aurait alors environ trente ans lors de la rédaction de ce manuscrit, et ainsi, elle porte son nom d’épouse, Milanges, illustre famille auvergnate dont Jacques Milanges, conseiller du roi, fut l’un des membres les plus connus.
Cet ouvrage, dédicacé à sa fille, est destiné à être diffusé en-dehors du cercle familial puisque l’auteur s’adresse directement à nous, lecteur, dans une note écrite en latin et en français sur la page de titre : « Seria cum possim, quod delectantia malim scribere, tu causa es Lector. … / Si pouvant ecrire des choses sérieuses, j’ai préféré celles qui vous plaisent, Lecteur ! vous en êtes la cause. » Néanmoins, il semble que ce manuscrit soit encore une ébauche de travail car des inscriptions manuscrites au crayon sont présentes soulignant certains paragraphes à supprimer. Il s’agirait alors d’une première mise au propre avant le manuscrit définitif ?
L’histoire débute au château d’Hemicour, au mois d’octobre 1793, et prend fin le 3 juin 1799, année de rédaction par Louis de Bruno. Le lieu, situé en actuelle Île-de-France, est vraisemblablement fictif : il en est de même des personnages. Dans le chapitre deux, « Mademoiselle d’Hemicour est transférée au château de Chantilly. Rencontre intéressante » (pp. 12 – 22). Ce roman doit très vraisemblablement trouver son intrigue dans la vie sociale de la région parisienne et de l’Oise familiers à Louis de Bruno. On y trouve aussi des références à un « château de Tremblecour » (chapitre 33, « Melle d’Hemicour arrive au château de Tremblecour, séjour habituel de Made de Sénermont… », pp. 1 – 14). Pourrait-il s’agir de Tremblecourt en Meurthe-et-Moselle (Lorraine) ?
L’auteur place son récit dans la dernière décennie du XVIIIe siècle marquée par l’après-Révolution, la Terreur, jusqu’à la fin du Directoire. Ainsi, plus qu’une histoire d’amour épique et impossible entre l’héroïne orpheline Blanche et le bel Enguerrand, c’est une histoire de France que nous propose Louis de Bruno au cœur de cette époque troublée. Ce récit, s’achevant sur une fin heureuse, est-il l’écho de la vie de Blanche, sa propre fille ?
Comme l’indiquent les ex-libris sur chaque volume, le roman n’a vraisemblablement jamais quitté la bibliothèque familiale puisqu’il se trouve dès le XIXe siècle au sein de la bibliothèque de M. Bruno de Molaret, sans doute Ferdinand-Louis Bruno-Molaret, petit-fils de Louis de Bruno.