Virulente diatribe contre les journalistes et les critiques.

GUITRY Sacha (1885-1957)

Pensées par Sacha Guitry

France, s.l.n.d. [après 1945]

In-4, f. de titre, f. avec ex-libris, 6 ff. à l’encre bleue sur papier orangé, montés sur onglets sous couverture papier japon à rabats avec pièce de titre contrecollée. Ratures et corrections, coupures restaurées. (Moleskine brune imitation cuir, reliure d’époque).

Dimensions : H. 280 × L. 225 mm.

English abstract

GUITRY Sacha
Pensées par Sacha Guitry


In French, Autograph manuscript on paper, 6 ff.
France, undated [after 1945]
Modern binding of imitation leather. Dimensions: 280 × 225 mm.


Virulent rant against journalists and critics : « Efforcez-vous d’acquérir, par votre travail et une conduite exemplaire, le droit de juger les autres. Lisez avant d’écrire.. »
Autograph manuscript signed “Sacha Guitry” at the end of the volume. Guitry begins his text with the following misogynistic thought: “Women talk too much (even
supposing that I am not the first man to have expressed this thought, I absolutely require that it appear here).”


Provenance: Ex-libris by Jean-Michel Tichoux.

Manuscrit auto­graphe signé « Sacha Guitry » en fin de volume.

Guitry place en tête cette amusante pensée digne de son humour piquant : « Les femmes par­lent trop (en sup­posant même que je ne sois pas le premi­er homme ayant for­mulé cette pensée, je tiens essen­ti­elle­ment à ce qu’elle fig­ure dans ce volume ».

Il pour­suit son pro­pos par des pensées révoltées envers cer­tains journ­al­istes : « J’estime qu’un journ­al­iste fais­ant partie de la rédac­tion d’une espèce de petite revue illus­trée et qui vient chez vous pour vous annon­cer sim­ul­tané­ment qu’il a per­son­nelle­ment besoin d’argent et qu’il est d’autre part assez bien placé pour pouvoir « faire saut­er » c’est-à-dire dis­paraitre, les échos qui ris­quer­ait de vous désob­li­ger dans le prochain numéro du journ­al auquel il col­labore, j’estime, dis-je, que ce journ­al­iste est petit cochon. Chaque fois que je suis injur­ié dans un de ces petits heb­doma­daires louches […] ma première pensée est de répon­dre et de rec­ti­fier l’écho qui m’a pendant une seconde énervé […]. Ce sont pour la plu­part des jeunes gens de 25 à 30 ans qui n’ont déjà plus le respect de la vie privée et du trav­ail des autres. Au lieu de faire des livres, s’ils aiment la lit­térat­ure, au lieu de cre­ver de faim comme Balzac ou Stend­alh, ils préfèrent vivre à la petite semaine […]. Ce sont les totos du théâtre et de la lit­térat­ure. En dehors du chant­age, ils ont pour assurer leur matéri­elle, le men­songe et la mauvaise foi […]. Nous trav­ail­lons, nous autres, messieurs. Nous avons un méti­er, un art, une fonc­tion. Nous sommes utiles à notre pays dans la mesure de nos moy­ens […] Effor­cez vous d’acquérir, par votre trav­ail et une con­duite exem­plaire, le droit de juger les autres. Lisez d’abord avant d’écrire. […] ».

Parmi les célèbres cita­tions de Guitry parv­en­ues à la postérité, nous pouvons sélec­tion­ner celle-ci dans ce manuscrit : « Leur cou­ard­ise égale seule leur stu­pid­ité ». Guitry rap­pelle l’esprit de grands auteurs d’une époque révolue (Octave Mir­beau, Laurent Tail­hade, Léon Bloy) : « C’était beau, parce que ces gens là se bat­taient pour quelque chose, pour une idée, pour un idéal, par esprit de justice – et non pas à la façon de ceux qui, dans l’ombre, cachés der­rière un masque ne tirent un coup de pis­to­let dans le dos, sans rais­on, par méchan­ceté, par envie, par simple rage d’être impuis­sants et bêtes – et tim­ides ! ». Il com­pare donc cer­tains des journ­al­istes de son temps à des jeunes filles car « tim­ides comme des filles ».

Guitry écrit ses lignes à une époque où on lui prête un « mot stu­pide » qu’il déclare n’avoir jamais pro­non­cé au sujet d’un départ pour Nice où il n’est jamais allé (f. 4). Le manuscrit date donc d’avant l’installation de l’artiste dans la cité balnéaire.

Fils du comédi­en Lucien, Alex­an­dre, dit Sacha Guitry (1885−1957) sut se faire un prénom. Comédi­en, auteur de théâtre, roman­ci­er, cinéaste, il se place dans la lignée de nos meil­leurs artistes du XXe siècle. Son humour est acide et tendre, per­spicace et cinglant. Sa cible favor­ite fut la femme. La première phrase de ce manuscrit le démontre.

Proven­ance : Ex-lib­ris de Jean-Michel Tichoux.